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    Mais voilà qu’une nuit, je vécus une nouvelle expérience. J’étais en train de voler, un peu à la manière des supermen des feuilletons, allongé, les mains en avant, quand je me suis dit : « Merde, je vole, donc je rêve ! » Aussitôt, je pris conscience du paysage qui défilait sous moi comme un décor de cinéma, et de la latitude que j’avais de me diriger où bon me semblait. Je sentais le vent qui agitait mes habits, l’humidité des nuages, la fraîcheur de l’air. J’expérimentais sans tarder mon nouveau pouvoir, survolant tout à coup les Buttes-Chaumont, près desquelles j’habitais alors, me rapprochant de la cime des arbres, puis montant plus haut sans aucun effort, comme un grand oiseau.

    Dans les semaines qui suivirent - j’étais en vacances, et j’avais tout le temps de mener ces expériences - je fis de grands progrès et exécutais avec aisance des vols supersoniques et des sauts périlleux aériens. J’appris à décoller debout. Je savais voler.. en rêve, autant dire en vrai : je veux dire, l’éprouver comme si c’était vrai.


     Puis le travail reprit ses droits. J’oubliais mes loopings nocturnes d’un été. Une chose est sûre : le vol en rêve, c’est comme le vélo. Une fois que vous avez appris, vous savez pour toute la vie.

    Frédéric Joignot

    « Au fémininLa vie »