•  

     

    Dans les semaines qui suivirent, je fis à nouveau le même rêve, sans toutefois arriver à faire intervenir d’autres personnes, des jolies femmes, à ces ébats. Jusqu’à ce qu’une nuit, je me retrouve au lit, en rêve, avec une adorable Eurasienne que je n’avais pas fréquentée depuis longtemps. Et maintenant, elle débarquait dans mon rêve, vêtue de ses seuls longs cheveux noirs, roulant sous une couette profonde, les yeux plissés par le désir. Ce fut un rêve à moitié lucide, où je ne menais guère le jeu, emporté par les délices du rêve, mais assez cependant pour que j’accapare la belle en pensant : « Elle est là. Profites en… »
     Au masculin
    Nos ébats me menèrent ce jour-là à la lisière de l’orgasme. Quand celui-ci fut très proche, je me réveillai avec une sensation de plaisir et de plénitude extrême. Le fait d’avoir frôlé un spasme en rêve, d’avoir vécu une nuit de sexe dans tous ses détails, avec une authenticité violente, me semblait prodigieux. Le rêve pouvait donc simuler, jusqu’à défier, la réalité. L’outrepasser ? Notre univers intérieur était assez riche, assez inventif pour nous offrir en cinérama le plaisir sexuel ?

    Frederic Joignot


  •  

     

      

    Je n’ai pas de plus riches, de plus intenses souvenirs que ceux de ces instants où la main de Giselle vient se poser sur moi, en un geste d’une douceur inexprimable, résumant tout d’elle et de moi. Je ne la vois pas encore, je sais qu’elle est là, que j’échappe à ma solitude, à la Solitude, à toutes les solitudes possibles et imaginables. Jamais ce premier contact n’est identique, tout à fait identique à ceux qui l’ont précédé : tantôt elle me saisit au poignet, à l’épaule, aux chevilles, ou ses mains se croisent sur ma poitrine, tantôt c’est un appel, un soupir, une sorte de frisson qui m’enveloppe. (…)

     Au masculin

    Je regarde ma main, incrédule : rien de visible d’abord, puis sous l’effort de la volonté tendue, la présence ressentie se matérialise ; non pas « elle », mais une jolie jeune femme (âgée de vingt à vingt-cinq ans), dont je distingue seulement le haut du buste et le visage pâle et mince (sans lui ressembler vraiment, elle a le style de Katharine Hepburn). Elle vole alors à côté de moi, sa main dans la mienne, dans la féerie de ce qui est maintenant une nuit claire. Je l’attire à moi, l’enlace, regarde ses yeux, ce visage inconnu, à la fois paisible et fervent. J’embrasse ses lèvres, étreins son corps aux trois quarts invisible, retrousse et froisse de la main droite le léger tissu dont je la sens enveloppée.

     


  •  

     

      

    Arrivant au château à la croisée de deux couloirs, j'exerçai mon libre arbitre et, optant pour celui de droite, j'aboutis rapidement à un escalier. Avide de découvrir une issue, je descendis les marches qui m'amenèrent près du faîte d'une immense voûte souterraine.

     Du pied des escaliers, je pouvais voir le sol de la caverne, en pente abrupte, s'enfoncer au loin dans l'obscurité. Plusieurs centaines de mètres plus bas, j'aperçus ce qui ressemblait à une fontaine, entourée par des statues de marbre. Mon imagination saisie à l'idée de me baigner dans des eaux symboliquement régénératrices, je descendis aussitôt la pente. Pas à pied, cependant, car chaque fois que je veux aller quelque part en rêve, je vole.

     

     Dès que j'eus atterri à côté du bassin, je fus très étonné de découvrir que ce que j'avais pris d'en haut

    pour une sculpture inanimée m'apparaissait à présent comme un être bien vivant et plutôt inquiétant.

    De fait, un génie effrayant et gigantesque surplombait la fontaine : le Gardien de la Source, comme je le

    sus immédiatement, de quelque façon.

    Affrontement

     

     Toutes mes forces instinctives me commandèrent d'un seul cri :

    "Fuis!" Mais je me souvins alors que cette apparition terrifiante n'était qu'un rêve.

    Enhardi à cette pensée, je dominai ma peur et, au lieu de fuir, je m'envolai droit vers la créature.

    Comme c'est souvent le cas en rêve, avant même que je fusse à sa portée, d'une manière ou d'une autre,

    nous avions atteint la même taille, et à présent, face à face, je pouvais la regarder droit dans les yeux.

    Prenant conscience que ma peur avait engendré cette terrible vision, je résolus d'étreindre ce que j'avais été si prompt à rejeter et, le coeur et les bras ouverts, je pris ses deux mains dans les miennes.

     

    Au fur et à mesure que le rêve se dissipait lentement, le pouvoir du «génie» semblait se fondre en moi, et je m'éveillai empli d'une vibrante énergie. Je me sentais prêt à tout »

     

     

    Laberge

     

     

     


  •  

     

      

    Je rêve depuis quelque temps déjà lorsque, soudain, je deviens conscient de rêver.

     Aussitôt lucide, je sens un courant d'énergie fourmillante qui s'élève dans ma tête et vient s'installer au niveau de mon front.

    Les images du rêve changent subitement et j'ai maintenant devant moi un arbre vert, un conifère d'une incroyable beauté. Ses branches sont couvertes de neige, chacune d'entre elles s'équilibre délicatement sous le poids de la neige poudreuse, blanche, scintillante, claire, vraiment merveilleuse. C'est un spectacle absolument splendide, si beau, si précis.

    Energie 
    Je décide de prendre mon rêve en main et je commande mentalement à l'arbre de devenir …(pause) … un lapin! Après cette courte pause, il me vient une pensée : "Un lapin ? Pourquoi pas ? Un lapin, c'est juste ce qu'il faut!". L'arbre disparaît aussitôt. Il n'y a plus dans mon écran visuel qu'un écran brun, vide. Je suis désappointé. Je choisis de continuer à visualiser un lapin. Bientôt, la silhouette d'un lapin apparaît en contours blancs sur le brun de l'écran. Je le vois d'abord de côté, puis par derrière, tandis qu'il se met à sautiller de-ci de-là, avec des mouvements de dessin animé.

     
    Tout à coup, la scène change. Je redresse le dos, je regarde droit en l'air. Je vois un bel aigle, ou peut-être un faucon, planant au-dessus de moi, faisant du sur place, les ailes déployées. Le ciel est d'un bleu absolument pur et les rayons du soleil filtrent lentement à travers les plumes de l'oiseau qui paraît auréolé de lumière. Des étincelles de soleil tombent lentement vers moi, comme une averse tendre et douce. Je suis à la fois impressionné et rempli de joie, face à la beauté de ce spectacle que je savoure entièrement, attentivement, dans tous ses détails.

     
    Soudain, je m'éveille. Je reste allongé sur le lit, les yeux clos, l'esprit bien clair, baignant dans le souvenir lumineux de la vision.

      


  •  

     

     

      

     Il était tard et je reposais dans le lit sur le point de m'endormir. Ma femme avait déjà sombré dans le sommeil.

     L'état se développa dans ma tête puis gagna l'ensemble de mon corps. Je sentis bientôt une sorte de pression contre mon épaule. Curieux, je tendis la main pour découvrir ce qui me poussait ainsi. Elle rencontra un mur lisse. Je déplaçai ma main sur sa surface uniformément lisse et ininterrompue.

     
    Mes sens parfaitement en alerte, je m’efforçai de scruter l'obscurité. Il s'agissait d'un mur et j'étais couché, mon épaule pressant contre celui-ci. Je songeai aussitôt que je m'étais endormi et que j'étais tombé de mon lit. (...)

     
    Je regardai de plus près. Quelque chose clochait. Ce mur n'avait pas de fenêtre, aucun meuble n'y était appuyé aucune porte ne s'y ouvrait. Ce n'était pas un mur de ma chambre. Pourtant il m'était familier. Je l'identifiai aussitôt. Il ne s'agissait pas d'un mur mais du plafond. Je flottais près du plafond, le cognant légèrement à chaque mouvement. Je roulai dans l'air, sidéré et je regardai vers le bas.

     Au-dessous de moi, dans l'obscurité, j’aperçus le lit. Deux personnes y reposaient. A droite je distinguais ma femme. A ses côtés un homme. Tous deux étaient endormis.
     

    Quel étrange rêve, songeai-je. J'étais intrigué.

    Quel était cet homme que j'imaginais allongé aux coté de ma femme. Je l'observai plus attentivement et le choc fut brutal.

     
    L'homme n'était autre que moi !

     
    Ma réaction fut presque instantanée. J'étais ici, mon corps était là.

    Désespérément, tel un plongeur, je me précipitai vers mon corps et le réintégrai. Je sentis aussitôt le lit et les couvertures et lorsque j'ouvris les yeux, j’aperçus la chambre vue du lit.

      Mon coeur battait la chamade, mais pas de manière excessive compte tenu de la situation. Je bougeai bras et jambe. Tous paraissait normal. Les vibrations avaient cessé. Je me levai et marchai à travers la chambre, je regardai par la fenêtre et fumai une cigarette.
    Il se passa un long moment avant que je ne ne trouve le courage de regagner mon lit, de m'y étendre et d'essayer de trouver le sommeil. (...)

     

    Robert Allan Monroe (1915–1995)